Nous avons tous l’image , de cette personne en charentaises, le journal sur le ventre, regardant d’un œil la fenêtre et de l’autre le feu qui crépite.
S’interrogeant par là si il est plus sage d’admirer de loin le paysage ou de faire une balade.
Ce dilemme n’est t’il pas le même lorsque qu’il s’agit de la construction d’un monde meilleur ?
Nous avons toujours le choix entre observer et agir , mais les deux ne sont t’il pas complémentaires à la construction d’un monde meilleur ?
A première vue l’idée de la creation lorsqu’il s’agit du « monde » dans lequel on se représente vivre peut sembler légèrement utopique. Ainsi comment s’accorder sur ce que signifie un monde meilleur d’une part mais également comment s’entendre sur la façon de le construire d’autre part ?
Autrement dit les modalités d’actions diffèrent en fonction de la définition de ce « monde » et fait intervenir la question des fondements de cet espace.
D’entrée de jeu, l’idée de construction suggère ici une réflexion sur l’ambition de réalisation, interrogeant à la fois le chantier actuel mais également la vision que nous avons de ce dernier.
Cette notion de « monde » pouvant être entendu tant en terme de représentation individuelle qu’en terme de vision commune elle va mettre en scène certains idéaux et valeurs afin d’affiner ce qui pourrait être des concepts « balises » à savoir s’entendre déjà sur ce que nous considérons comme étant « notre monde » avant de chercher à construire celui d’Autrui.
Mais alors sur quoi ces concepts reposeraient t’ils si ce n’est des valeurs individuelles et collectives ?
Car même lorsque il s’agit de valeurs « communes » force de constater que la mise en commun est parfois laborieuse et définir ce qui peut être acceptable ou à déconstruire met au défi nos « mondes ».
Posant ainsi la question de ce que considère comme systémique, dans le cadre d’une réflexion collective afin de créer les conditions d’une coopération et de la mutualisation des savoirs, des compétences et des différences et de ce qui relève de notre propre fonctionnement et représentations variant au cours des étapes de notre existence . Ainsi cette construction n’est t’elle pas avant tout individuelle ?
Si elle doit prendre la forme d’un ajout ou d’un changement de paradigme , au niveau personnel nous pourrions tenter de déterminer certains indicateurs illustrant non pas le bonheur ou la performance mais la capacité de résilience grâce à un écosystème solidaire et empathique au niveau collectif. Une sorte de « plue value » de notre « apport au monde » qui parce que nous sommes en adéquation avec nos valeurs , notre vision et notre être au monde va en quelques sorte « déborder » comme un bien collectif. Cela peut prendre la forme d’une éducation, qui incarnée au quotidien va être source d’inspiration pour nos collègues , nos voisins.. Ou tout trait de caractère mettant en avant notre authenticité.
Comment allons nous nous insérer dans ce projet de « construction d’un monde meilleur » à l’égard de qui nous sommes et des personnes avec lesquelles nous allons collaborer?
Au-delà des problèmes de la représentation des valeurs , la question ne se borne pas à savoir si il pleut ou si les conditions sont favorables à la dégustation de coquillages mais dans le choix qui s’opère par et grâce ce constat ,de comment par ce choix s’opère la « redistribution » à savoir son « apport au monde ».
Si nous reprenons notre homme en charentaises, peut importe le choix qu’il va faire il trouvera du plaisir dans ses actions ( c’est du moins ce que l’on espère pour lui) en revanche son impact sur le « monde » sera différent, car le rayonnement de ses actions ne sera pas le même.
La question de la résilience d’une part ( j’avais envie de courir mais la pluie s’en mêle je dois donc m’orienter vers une autre activité ) ainsi que de la mobilisation de son énergie dans l’action qu’il choisit d’autre part détermineront en quelque sorte son « apport au monde ».
Peut importe qu’il choisisse de rester « au coin du feu » ou d’aller manger des coquilles Saint jacques , car comme le souligne Vladimir Jankélévitch (1) , « c’est par le choix des vertus » que l’on participe à un monde « meilleur » si dans le quotidien (comme en morale) seules les actions comptes , on peut considérer que le choix de rester au coin du feu peut honorer des vertus conservatrices (comme la fidélité, la patience…) .
A défaut d’une participation « active » illustrée par les vertus de l’instant (comme la générosité, le sacrifice) le choix de ce que l’on pourrait considérer comme passif prendrait ainsi tout son sens ( par les vertus conservatrices).
Ainsi, sans s’insérer dans un collectif, notre homme fait le choix d’incarner ses valeurs en ce sens peut importe l’endroit où le moment, ces manifestations sonneront son « apport au monde » dans un collectif « inopiné ».
A ce stade nous pourrions considérer être assez éloignés de notre questionnement de départ ( à savoir si un monde meilleur réside dans un complément culturel ou encore de l’injonction de nouvelles normes éthique et de vie ensemble ?) mais si comme l’évoque Vladimir Jankélévitch agir au nom du bien ne suffit pas , comment alors déterminer les actions et les principes d’un monde meilleur ?
Comment notre homme pourrait t’il envisager ses agissements à l’égard de cette ambition ?
Le discours semble d’une piètre utilité face à ces objectifs et ne peux se suffire à lui même , au mieux il ne serait qu’un bavardage mièvre et vide de sens si il n’est pas incarné par un comportement.
Néanmoins, la nécessité de s’accorder sur les actions et les valeurs qui nous unissent semble être requise (à savoir s’interroger sur les «modalites d’actions »), mais le dialogue est t’il le seul moyen pour fonder des accords et des moyens de participation ?
Puisqu’il ne s’agit plus seulement de « définir » mais bien de coopérer dans la construction d’un monde « meilleur » ne s’agit t’il pas avant tout d’être attentif a Autrui (2) par nos comportements, nos actions tant à la fois comme notre homme dans ce que l’on donne à voir de nous que dans ce que l’accueille de l’Autre ?
Si tel est le cas nous pouvons ici identifier un engagement actif , mobilisant chaque citoyen, chaque acteur dans le désir de répondre à une absence à savoir: une « simple » bienveillance.
Cette absence clamée comme une absence de solidarité, demandant une mobilisation forte ainsi des axes coopération et d’information ( exemple : faire des campagnes c’est alerter mais en quoi cela participe à un monde meilleur) est t’elle un véritable problème social ou la création d’une cause commune ayant pour objectif de ne pas s’interroger sur ses propres valeurs et notre façon de les véhiculer ?
Si comme nous avons pu le voir, construire un monde meilleur est aussi l’art de porter des charentaises, à savoir assumer sa singularité alors cet art reflèterait notre propre engagement actif , celui que nous pouvons mobiliser à tout instant sans attendre d’énièmes délibérations et ou d’ hypothétiques moyens d’actions.
Il s’agit d’un art personel, certes parmi tant d’autres mais qui face a la perpective collective nous demande comment cooperer avec nos individualités.
L’art de porter des charentaises serait donc celui d’une construction par et grâce nos singularités créant ainsi les conditions d’un monde meilleur ?
(1) Traité des vertus , Flammarion Champs
(2)Emmanuel Levinas, Éthique et infini , Le livre de poche