Nous découvrons ici le parcours d’Agathe Vidal, consultante en éthique et philosophie, fondatrice de l’Institut Cogito et de Philo and co…
Etudes, lectures, projets… Voici son témoignage !
Pouvez-vous vous présenter ? Que faites vous actuellement ?
Aujourd’hui je me forme de façon plus spécifique en didactique de la philosophie en Belgique, afin d’étudier les différents modes d’enseignements de la philosophie, son rapport aux autres disciplines et son impact dans tous les secteurs où la philosophie est présente.
Ce choix s’est imposé afin de répondre à la question de la place de la philosophie et de ses moyens de transmissions.
Lorsque j’enseignais à mes élèves, ils trouvaient que trois heures par semaines ce n’était pas suffisant, et ils s’indignaient de l’exigence des épreuves face au manque de moyens pour se familiariser avec la discipline. Ils percevaient les liens avec les autres disciplines mais déploraient le fait de l’apprendre en dernière année et de n’avoir aucun cadre pour le faire.
C’est ainsi que j’ai commencé à créer des ateliers de philosophie.
Jusque-là, mon expérience des ateliers de philosophie se limitait à ceux de L’AGSASS et ceux réalisés avec le GENEPI.
Ainsi le site Philo and co servait surtout à la création d’ateliers de philosophie pour mes élèves, puis d’autres personnes sont venues régulièrement, ainsi le site a été l’occasion d’organiser des évènements pour des associations.
C’est dans ce contexte que la demande d’un roman initiatique « Se manquer » s’est présentée, ce qui a été l’occasion de riches rencontres et d’échanges qui n’ont fait que confirmer le besoin pour chacun d’avoir un espace pour pratiquer la philosophie et se familiariser avec les auteurs, les thématiques philosophiques mais aussi s’interroger sur le rôle et les pratiques de la philosophie au sein de la Cité.
C’est dans cette perspective qu’en 2017, que j’ai fondé l’Institut Cogito afin qu’il existe une structure permettant à qui le souhaite (entreprises et particuliers) de se former et d’être accompagné dans sa quête philosophique.
Le principe est de réaliser des formations sur mesure mais également des événements et accompagnements de façon à donner à tous l’opportunité de se familiariser avec la discipline.
Quel souvenir gardez-vous de vos études ? De vos professeurs ?
A l’époque ou je passais la Licence, on me faisait régulièrement la réflexion de l’utilité de la philosophie dans un monde capitaliste, ma réponse était « qu’étudier la philosophie ne me donnerait probablement pas l’argent pour vivre mais m’offrirait le luxe de l’épanouissement ».
Les études à mon époque me semblent donc surtout être une chance, à l’heure des réformes actuelles mais également de la construction de nouveaux types d’enseignement (en ligne) et des restrictions budgétaires des laboratoires.
J’ai eu la chance d’avoir des professeurs pour la plupart aussi brillants que passionnés et si à l’époque c’était une opportunité par l’accès, elle l’était surtout en ce qui concerne les moyens (sociaux et intellectuels) pour profiter pleinement du savoir de nos maitres et en comprendre les intentions.
Quel est le livre de philosophie qui vous a particulièrement passionné ? L’auteur pour qui vous avez eu un véritable coup de foudre ?
On peut dire que Levinas m’a particulièrement passionné en particulier son éthique du visage, où il qualifie l’accès au visage, comme d’emblée éthique :
C’est lorsque vous voyez un nez, des yeux, un front, un menton, et que vous pouvez les décrire, que vous vous tournez vers autrui comme vers un objet. La meilleure manière de rencontrer autrui, c’est de ne même pas remarquer la couleur de ses yeux !
Pouvons nous parler d’attention du visage ? Certainement pas, il s’agit certes d’être d’attentif mais à quelque chose qui nous dépasse tout en nous reliant. Sans pour autant rentrer dans l’aspect mystique de ce texte, ne serait ce pas, par cet « accès » que devrait commencer toute nos interactions avec autrui ?
Et sur la forme de nos interactions, la troisième partie du troisième chapitre de L’être et le néant :
Regarder le regard d’Autrui, c’est se poser soi-même dans sa propre liberté et tenter, du fond de cette liberté, d’affronter la liberté de l’autre.
Parler de la relation comme d’un rapport sujet-objet m’interpelle tout autant aujourd’hui que le jour ou j’ai lu ces pages et c’est peut-être pour cela qu’il s’agit d’auteurs qui ne me quittent jamais avec Kant, Merleau-Ponty.
Au-delà de cet attachement profond c’est la rencontre avec Égard Morin, n’a fait que confirmer mon intuition, par son approche en particulier dans le tome VI, de « la méthode, l’Éthique “, et la pensée complexe.
Avez-vous déjà essayé d’écrire ? Pourriez-vous nous parler de vos créations ?
J’ai commencé mon expérience de l’écriture à 13 ans, à cet âge, ou j’ai écrit mon premier roman « social ».
Depuis ce jour j’ai développé un fort appétit pour les sciences humaines et sociales, et dévorais les livres de psychologie surtout en cours de maths avant de me plonger dans les ressources philosophiques (et ne plus jamais m’en défaire).
Plus tard, adolescente je réalisais des exercices à partir de concepts pour passer le temps dans ma province natale, puis lorsque je me suis installée à Paris j’ai continué à écrire (roman, réflexions, poèmes et aphorismes…) et ai écrit un autre roman sous forme de réflexions en parallèle de mes études en philosophie.
Le récit philosophique a pris une place importante comme réponse à la demande d’un public qui souhaite se familiariser avec la philosophie tout en faisant l’expérience de la réflexion et c’est dans cette perspective que j’ai publié « Se manquer » et souhaite publier d’autres romans initiatiques.
Entretien avec la philosophe et auteure Agathe Vidal sur les sources de l’inégalité Femmes-Hommes et les voies, éducatives et « managériales » notamment, pour la réduire.
La Revue Civique : Une tribune, publiée par le journal Libération, s’élevait contre l’inégalité dont sont victimes les femmes dans le « monde de la philosophie » auquel vous appartenez. Constatez-vous cette inégalité en ce secteur et quelles en sont les principales causes ?
Agathe VIDAL : Au niveau historique, l’inégalité trouve sa source dans une tradition universitaire, dont il serait intéressant d’interroger les influences; en France, l’entrée des femmes dans l’enseignement supérieur s’amorce en 1861 (1). Nous pouvons ainsi prendre en compte l’influence des Jésuites et de l’ordre des Ursulines au début du XVIème, et la mixité au XXe siècle (2), à savoir ce qui a façonné les esprits et les mentalités dans le monde universitaire, c’est une évolution lente et progressive.
L’université, en plus de créer un nouvel essor à visée démocratique, a du construire un nouveau monde académique qui a du s’affranchir de certains dogmatismes qui le faisait vivre jusqu’alors. Les questions propres aux hommes et aux femmes n’étaient pas centrales dans la mesure où, d’une part, l’institution devait s’affirmer en tant que telle face à une forte empreinte historico-culturelle chargée et que, d’autre part, ces questions étaient tributaires de l’évolution des mœurs.
C’est avant tout les inégalités scolaires, dénoncées par Bourdieu (3), qui peuvent apparaître comme une des causes nous permettant de comprendre de façon plus large cette question. En effet, Simone de Beauvoir aurait-elle pu passer l’Agrégation sans une condition sociale privilégiée ?
Dans un second temps, il serait intéressant de savoir si cette inégalité serait le propre de l’institution universitaire ou si elle touche de façon plus large le monde du travail ? Si tel est le cas, quel type de poste ? Nous retrouvons ici l’idée d’une société de classe, où la question de l’inégalité dont souffrent les femmes pose par ricochet une problématique plus large. Étant confrontée à des inégalités issues d’une empreinte historico-culturelle mais aussi sociale, une femme comme un étudiant possédant « les codes » aura plus de chances d’avoir accès à un poste car son insertion pose problème dans tous les domaines relavant de fonction dites « masculine », autrement dit les fonctions de pouvoir et non uniquement le monde de la philosophie.
Nous voyons donc, en ce qui concerne le secteur académique, que nous avons un double mouvement pour l’institution: celui d’accepter les femmes comme étudiante, de coexister en tant qu’étudiants sans pour autant prendre en compte leurs différences et leurs qualités, leur demandant de s’adapter à un «code» masculin, résultat de l’échec des années soixante-dix (4).
Par conformisme, il s’agit de suivre les désirs et le modèle masculins
Les conséquences de cette mixité n’ont pas été anticipées et nous voyons par exemple chez les jeunes, par exemple sur des questions de sexualité qui arrivent plus tôt, que les jeunes filles apprennent par des vidéos ou des magazines comment satisfaire un garçon mais n’ont aucune connaissance de leur propre corps. Agissant par conformisme, il s’agit de suivre les désirs et le modèle masculins, de savoir plaire à un âge ou les besoins de s’affirmer et d’être accepté est plus fort que d’être respectée.
Il n’est donc pas étonnant de retrouver ces mêmes systèmes de pensées sur les bancs de l‘université, les mœurs évoluant plus lentement que les parcours féminins, tout comme dans les autres sphères où il est question de partager une représentation du pouvoir, dont sont habituellement dotés les hommes.
La question de l’équité reste centrale, qu’elle soit sociale ou disciplinaire, tant qu’un seul modèle domine et qu’au lieu de s’affirmer on s’y soustrait, les inégalités peuvent sereinement s’accentuer et se développer; ce qui se comprend dans une société où se donner les moyens d’affirmer ses différences, c’est prendre le risque d’être marginalisé.
Cela est-il le propre d’un type de secteur ou l’égard de certains postes connotés à « domination masculine » ? Une coiffeuse ou une boulangère subit-elle le même type d’inégalité ? La réponse nous engage à comprendre la force des représentations dans l’inconscient collectif et nous demande à en interroger le sens. En ce qui concerne plus particulièrement le monde la philosophie, il serait intéressant de se demander si cela concerne uniquement la philosophie ou toutes les filières universitaires ?
Si la philosophie aussi à son histoire, et ce n’est pas tant un problème de guerre des sexes que de mathématique. Quantitativement, il y a très peu de postes et outre les problématiques évoquées ci dessus, nous pouvons voir qu’historiquement elle aussi a dû se battre, pour conserver un espace qui n’est (il faut se le rappeler) toujours pas acquis, relayée au champs des sciences dites « molles ».
Une discipline qui se retrouve marginalisée
Actuellement, tout porte à croire, qu’elle est en train de disparaître, que cela soit dans l’enseignement général par la filière « humanités », dans la recherche (de moins en moins de fonds attribués), on regroupe les laboratoires: par conséquent, il est urgent de comprendre que le problème n’est pas une question de sexe mais bien de la place de la philosophie dans le pays des Lumières. Cette discipline, qui faisait la force de notre pays, se retrouve aujourd’hui marginalisée.
Après avoir fondé les savoirs, chez les Grecs anciens, constitué un socle d’apprentissage, participé à la création d’autres disciplines, elle se retrouve aujourd’hui mise à l’écart de l’école, réduite à une peau de chagrin dans le système actuel et sous forme de divertissement dans l’espace public. Ainsi réduite dans ses moyens et menacée dans ses fonctions, on peut se demander s’il n’y a pas une inégalité de la philosophie comparée aux autres savoirs.
Néanmoins, par quels types de mesures, selon vous, le problème général de l’inégalité Femmes- Hommes dans le champ professionnel peut-il être réglé, au moins partiellement et progressivement ?
C’est dès le plus jeune âge, que la question se pose : dans la prise en compte des différences biologiques et de ses besoins, que cela soit en termes d’organisation que d’information, une jeune fille doit-elle être pénalisée car une fois par mois elle a son cycle ? À son retour à l’école, elle sera confrontée au regard des autres enfants, la prévention et la façon dont on intègre les aspects biologiques dans le parcours des jeunes sont donc primordiales pour sa vie de future professionnelle, il s’agit de s’interroger sur la façon dont chacune peut vivre sa féminité et la place que l’on lui accorde.
En termes de mesures, comme pour n’importe quelle inégalité cela passe d’abord par l’éducation des enfants, de l’individualité de leurs besoins et des moyens que l’on met en place pour les comprendre en leur laissant un « droit de cité »: que cela soit à l’école ou en famille, c’est dès le plus jeune âge qu’il est nécessaire de penser des mesures concrètes afin de construire la société que l’on souhaite. Il ne s’agit pas ici de polémiquer sur le rose ou le bleu, mais de réfléchir aux moyens qu’on offre pour que s’établisse cette mixité: est-ce que les espaces sont adaptés ?
« Laisser à chacun(e) la possibilité
de s’affirmer en tant qu’individu «
Si la prévention est nécessaire pour les filles est-ce également le cas pour les garçons ? À travers les mêmes sources ou plutôt adaptés en fonction des besoins de chacun ? Qu’est-ce que l’on choisit de transmettre à ces jeunes pour qu’ils puissent s’affirmer dans leur singularité ?
En termes de mesure concrète, nous pouvons envisager, comme le souligne Edith Maruéjouls, une acceptation des différences dans l’espace public : « À partir de l’entrée au collège, l’accès aux équipements de loisirs devient restreint pour les filles » (5). Encore une fois, il s’agit d’une quête d’équité afin de laisser à chacun la possibilité de s’affirmer en tant qu’individu.
Ainsi, cela demande non plus de nier nos différences afin de correspondre au modèle dominant mais de les affirmer, en développant une empathie à l’égard de nos incompréhensions et prendre le risque de ne pas être comprise. La tolérance est primordiale dans ce long processus de création de codes communs. Si nous souhaitons la création commune d’un code commun, il serait également intéressant de prendre en compte les modes d’expression et de communication mais aussi des savoirs être et des usages dans la reconnaissance de chacun.
Au niveau du monde professionnel, il y a actuellement une tendance à imposer la présence des femmes, dans les entreprises – Club Med, SNCF (6) – par le biais de quotas qui relèvent d’une vision selon moi assez dangereuse autant pour celle qui est recrutée que pour ceux qui seront amenés à travailler avec. En effet, cela demande d’adhérer au principe que son embauche est le résultat d’une contrainte économique (car son embauche est due au fait qu’elle soit femme et non parce qu’elle a les qualités pour le poste): ainsi, elle ne peut pas être légitime pour ce poste. Au-delà du caractère discriminant d’être embauchée en raison de son sexe et non pour ses qualités professionnelles, ce type de mesure illustre une vision limitée de l’humain et de son potentiel…
Penser de l’intérieur des équipes et non l’inverse
Comme pour toute révolution, cela risque de prendre du temps, mais l’enjeu est de taille, il s’agit avant tout de se donner les moyens de penser de l’intérieur de ses équipes et non l’inverse. Il s’agit de ne plus penser par des mesures externes aux individus (imposées par la force) mais de partir du principe que chacun a des ressources nécessaires et que c’est bien l’ambivalence entre nos forces et nos faiblesses qui fonde l’interdépendance et la force d’une équipe. Il ne s’agit pas de percevoir un changement par des règles provenant de l’extérieur mais de penser ensemble la création d’un code commun, basé sur la confiance de l’humain dans l’affirmation de ses différences accompagnant l’évolution des mœurs.
Pour commencer, pourquoi ne pas commencer par assumer ses différences au lieu de se caler sur un modèle masculin ? Affirmer son type de management mais aussi une autre vision du travail, de ses objectifs qui n’est spécifiquement dû à son sexe mais pensé en termes d’apport individuel. Ainsi, la question de la complémentarité, de l’apport de chacun et des valeurs d’équipes pourraient prendre forme.
Au lieu d’imiter les « anciens » codes, pourquoi ne pas faire émerger un nouveau discours, partager son langage afin d’établir ensemble des mesures spécifiques à chaque équipe ? Pourquoi ne pas évoluer ensemble et faire de nos différences des forces ?
Vous voyez déjà ici le caractère ambitieux du projet, qui consiste à en reconnaître chaque membre individuellement mais aussi à prendre en compte les systèmes de management actuel qui ne cesse de se transformer: pourquoi ne pas mettre au centre la valeur de l’humain ? Si actuellement les codes masculins prédominent n’est-ce pas dû au fait que les codes féminins ne se sont pas affirmés ?
Penser la complémentarité, passe par l’affirmation des différences. Cela sous-tend également, une vision commune un désir de partager des objectifs, tout en respectant son mode de travail. Ainsi, partiellement et à moyen terme, dans le milieu professionnel cela pourrait prendre la forme d’une reconnaissance mutuelle de l’apport de chaque membre de l’équipe et surtout d’une vision commune.
La France vous parait-elle mieux ou moins bien placée que d’autres pays, en ce domaine des luttes contre les discriminations, notamment celles liées au sexe ?
Si l’on observe quelques chiffres (7) en ce qui concerne les inégalités, comme le souligne Edith Maruéjouls, cela laisse songeur, nous pouvons nous demander si un bon positionnement consiste à accepter que chaque citoyen puisse se défendre alors que le jeu est tronqué par des questions de moyens financiers ?
Ou octroyer « le droit » de porter plainte pour ensuite se faire entendre, alors qu’un procès peut mettre des années ? Est-ce uniquement par la force et la justice que nous pouvons agir sur les mœurs ou existe-t-il d’autres solutions ? Pouvons-nous réduire cette quête de compréhension mutuelle à une question de chiffres ? Car si tel est le cas, nous nous retrouvons face un problème administratif, ne serait-ce que les quotas du nombre de plaintes ou encore celui de la notation des établissements scolaires, qui incite donc à faire taire les dérives…
Il y aurait aussi beaucoup à dire dans l’éducation dès le primaire néanmoins: si l’on se compare à l’Inde ou le Maghreb sans doute somme-nous « bien » placés mais à l’égard de quels vecteurs ? Qu’est-ce que ce positionnement nous révèle-t-il ? Quels sont les indicateurs et que nous disent les chiffres ? Il faudrait également savoir en quoi consiste ce « bien », qu’est-ce que serait un bon positionnement ? À l’égard de quelle référence ? D’un idéal ? Quelle serait notre vision d’un bon positionnement et comment cela se vivrait au quotidien ?
Il y a une forte incompréhension sur nos objectifs alors que nous avons les ressources mais il y a encore beaucoup à comprendre de notre pays et de ce que ce dernier souhaite pour les années à venir, de par notre histoire riche tant au niveau des traditions que des valeurs, qui se retrouve en confrontation directe avec un passé plus récent et des enjeux contemporains: voir par exemple la polémique sur le mouvement « Me too » (8), il ne s’agit pas tant d’une guerre des sexes que d’une guerre des castes.
C’est de notre responsabilité personnelle dont il est question
Nous pouvons néanmoins constater que face à toutes ces questions relevant des luttes contre les discriminations, nous nous retrouvons en difficulté entre un discours qui souhaite des moyens et des mesures, encourageantes certes mais inefficaces car la question n’a été traitée que de façon superficielle et la confrontation entre le discours et une réalité concrète met à mal les mesures déployées.
Nous voyons bien qu’il est à la fois difficile de s’affirmer par notre passé, sans prendre le temps de le comprendre et encore plus difficile d’accepter les pluralités des discours ambiants comme révélateurs des différentes visions d’un même pays ; mais néanmoins c’est bien ce dernier qui conditionne les mœurs d’aujourd’hui.
Ainsi, nous pouvons le nier et recourir à « l’empreinte d’une domination culturelle multiséculaire » pour justifier certains de nos manquements (un peu comme les systèmes de managements évoqués plus haut) mais notre responsabilité est à mobiliser si nous souhaitons aller vers plus de compréhension. Avant d’être un devoir citoyen, c’est de notre responsabilité personnelle dont il est question. Car, pour l’instant, il y a une forme de déni de notre histoire et de nos idées, qui s’affirme par une explosion des inégalités. Cela peut s’expliquer par notre système, tant que par le discours ambiant qui nécessite d’être « repensé » afin de ne pas se perdre dans des considérations superficielles.
S’interroger sur ses valeurs, notre vision de la France pour l’avenir, interroger nos objectifs et voir en quoi ils se distinguent d’autres pays, quelles sont nos spécificités, comment pensons-nous en France ? Quel est notre passé, quels sont nos mœurs ? Cela demande donc de déceler les paradigmes qui les sous-tendent afin d’appréhender une solution pouvant s’imprégner dans notre quotidien et s’insérant progressivement dans notre histoire.
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(1) Natalia Tikhonov Sigrist, « Les femmes et l’université en France, 1860-1914 », Histoire de l’éducation, 122 | 2009, 53-70.
(3) Alain Garcia, « Utiliser les théories de Bourdieu sur l’École », Éducation et socialisation [Online], 37 | 2015, Online since 01 March 2015, connection on 06 November 2018. URL : http://journals.openedition.org/edso/1191 ; DOI : 10.4000/edso.1191 -Top of page
(4) Il est ici question de l’échec français, de la révolution féminine, au lieu de s’émanciper la femme s’est illustrée comme objet voir : Jacques Saliba, « Eva Illouz, Pourquoi l’amour fait mal. L’expérience amoureuse dans la modernité », Terrains/Théories [Online], 2 | 2015, Online since 23 October 2014, connection on 06 November 2018. URL : http://journals.openedition.org/teth/318 -Top of page
Références bibliographiques proposées par Agathe Vidal :
Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, Les Héritiers, les éditions de minuit Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, La reproduction, les éditions de minuit Pierre Bourdieu, la Distinction, les éditions de minuit Émile Durkheim, L’évolution pédagogique en France, PUF Émile Durkheim, Éducation et sociologie, PUF Jacques Le Goff, les intellectuels au Moyen Âge, points seuil Emmanuel Levinas, Éthique et infini, Livre de poche Paul Ricœur, Soi-même comme un autre, point seuil Nathalie Heinich, États de femme, l’identité féminine dans la fiction occidentale, tel Gallimard Simone de Beauvoir, Mémoire d’une jeune fille rangée, Folio Eva Illouz, Pourquoi l’amour fait mal, point essais Eva Illouz, Les sentiments du capitalisme, Seuil
-Données démographiques sur les départements de philosophie en France