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Philosopher est t’il un acte de citoyenneté ?

Longtemps ( et encore aujourd’hui) j’éprouve une sorte de d’imposture à me considérer comme philosophe.

Ce mot au combien noble , situant mon être à la fois dans un corpus et une humanité, reste néanmoins toujours à définir et porte ainsi un caractère assez vertigineux.

Le fait d’être diplômé en philosophie fait t’il de nous des  philosophes ? 

Pour avoir fait nombre de rencontres dans des milieux divers, si il y a bien une chose dont je suis sure c’est qu’être philosophe est avant tout une disposition face à l’existence, savoir à l’accueillir et transmettre a Autrui les moyens de se l’approprier.

La spécificité de notre discipline a été largement malmenée au  cours des siècles et l’est encore aujourd’hui, certes…  

Mais  cela n’est t’il pas le propre d’une science qui s’interroge sur elle même, que d’avoir plusieurs visages afin de se rendre compréhensible à tous ?

Il est bien sûr primordial d’avoir une « vague idée » de ce que l’on considère comme « philosophie » afin d’arriver au fameux débat dichotomique entre philosophie et philologie.

Ainsi , souvent je me demande suis je vraiment une philosophe ?

Et si tel est le cas , a quel point mon identité , mon parcours a fait de moi une philosophe ?

 La question est importante car je pourrai me méprendre depuis plusieurs années et n’être, au malheur! 

 Qu’une  vulgaire sophiste !

Est ce  pratiquer la maïeutique , permet  d’écouter et de se  rendre disponible dans une posture d’humilité fait partie des tâches qu’incombe cette nomination ?

Si nous souhaitons offrir à Autrui l’espace nécessaire pour le développement et le rayonnement de son potentiel et de sa pensée la question,  mérite d’être posée.

De même , où positionner sa responsabilité?

Est ce que je me résigne à être transcendée par le visage d’Autrui  (1) ou bien dois je le considérer comme un objet (2 )?

Comment incarner l’amour , si profond et vivant que porte la philosophie dans son étymologie même dans mon quotidien a l’égard de ma vie si limitée en somme ?

Est ce sous la forme de don(3) d’un contrat ou bien d’un cadre bien défini ?

Car comme on a pu le voir au cours des siècles ont lui a souvent reproché son caractère élitiste et parfois préféré a position de l’artiste(4).

Néanmoins, depuis la révolution le concept de « citoyen » s’est immiscé dans le paysage , l’idée d’être libre et égaux en droits en quelque sorte.. Il paraît que par le seul biais de la naissance on acquiert des droits dans ce pays.

Mais , qu’est ce qu’être citoyen ?

Est ce s’instituer dans un système payer des impôts -vivre des allocations ?

Participer à la vie locale et/ou du pays en réponses aux besoins des gens qui nous entourent ?

Ou bien , éclairé par ces droits et prendre la liberté d’exercer la philosophie au quotidien ?

Ne serait ce pas la, le moyen  de participer ainsi à la vie locale et internationale en faisant usage de sa raison ?

Et par la, de leur offrir également les outils nécessaires pour développer leur esprit critique ?

Si l’on regarde l’histoire que cela soit à la période antique jusqu’à aujourd’hui, la  conception même de cette discipline se pense en terme « d’école de pensée ».

Autrement dit la philosophie comme toute discipline  demandait de faire la guerre des idées en choisissant son camp.

Une fois cela posé, il s’agit donc àde faire partie d’une communauté tout en gardant une singularité ( que l’on qualifie aujourd’hui de liberté pédagogique).

Ainsi  malgré ses spécificités propres qui font d’elle la mère de toute les sciences ( Pythagore) la tentation de la placer au même rang que les autres sciences a eu raison d’elle nous plaçant devant un constat d’impuissance de la pensée démunie de son potentiel elle se borne donc  à certaines siècles et auteurs .

Il y a certes des exceptions comme au Québec, au Canada , en Belgique et ou encore via certaines associations mais la tendance naturelle de l’homme à vouloir stigmatiser et classer ( tout comme la médecine a morcelé nos corps en disciplines propre à chaque membres et chaque système) elle s’est retrouvée parquée et cloisonnée  ainsi dans sa « case »  la coupant de son essence même et lui empêchant de faire son œuvre.

Peut être qu’il serait temps, tour comme Michel Foucault de s’interroger sur ces enjeux :

« Mais qu’est-ce donc que la philosophie – je veux dire l’activité philosophique – si elle n’est pas le travail critique de la pensée sur elle-même ? 

Et si elle ne consiste pas, au lieu de légitimer ce qu’on sait déjà, à entreprendre de savoir comment et jusqu’où il serait possible de penser autrement ? »

Sur la pratique quotidienne de l’activité philosophique, la posture de Diogene peut nous éclairer ( pas besoin de tire ni de maison , un tonneau suffit) incarnant ainsi ce « pas de côté » , cet esprit critique à la fois citoyen et en même temps illustrant le travail critique propre à la philosophie.

Kant lui même fera le même constat dans  « Aïe le courage de te servir de ton entendement ! »(5)

Ça a l’air simple et parfois même ironique lorsque l’on y pense , mais combien de personnes font ainsi usage de leur entendement ?

Combien même de personnes ayant les outils et les moyens de promouvoir la philosophie se contente de suivre l’instinct grégaire , illustrant ainsi le constat Nietzschéen dans la généalogie de la morale ?

Refusant de s’interroger sur notre système, leur rôle dans cette société et s’abandonnant ainsi dans le troupeau aux idéologies ambiantes ?

Combien  ?

Pour ma part cette question m’habite depuis mon plus jeune âge et en toute franchise je n’ai toujours pas la réponse, comme dirait Aristote c’est probablement encore en « puissance » et non pas en « actes ».

En revanche je constate que l’activité philosophique peut se manifester sous des visages très différents, celle du SDF de notre quartier , lors d’un échange dans une administration ou encore dans un café, une activité sportive  .. 

Mais bizarrement , sa nomination pose problème, mettant en avant  une distance entre le savoir et l’esprit critique qui semble s’incarner dans un pont à priori très difficile à traverser .

La dualité entre philologie et philosophie étrangement ne se rencontre pas  chez les enfants qui ne sont pas encore corrompus par les lobbys ambiants et peuvent ainsi suivre Kant en faisait usage de leur raison et parfois au dam de leur parents!

Peut être pouvons nous nous inspirer d’eux afin de pouvoir définir la philosophie ?

Faire ainsi la distinction entre sophistique et philosophie ?

(1)Ethique et infini, Levinas

(2)L’être et le néant, Jean Paul Sartre

(3)L’essai sur le don, marcel Mauss

(4)le philosophe artiste , Jean-Noël Vuarnet

(5) Qu’est ce que les lumières , Emmanuel Kant 

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